Dans les périodes de crise, la capacité des entreprises industrielles à maîtriser leurs modèles économiques et leur apport de valeur ajoutée est une des compétences clés. Les tensions sur les prix de revient s’accompagnent souvent d’une tension globale sur les relations « donneurs d’ordre / fournisseurs ».
La capacité à connaître précisément les marges de manœuvre économique et à maîtriser ses processus logistiques déterminent la capacité à prendre des marchés, à les conserver et à soigner la relation avec ses clients. La GPAO (Gestion de la Production Assistée par Ordinateur) est une des briques essentielles dans la maîtrise de cette capacité.
Qu'est-ce que la GPAO ?
Définition
Un logiciel de GPAO est un programme de gestion permettant de piloter l’ensemble des activités liées à la production. Il est généralement organisé par modules :
- Gestion des stocks et des achats
- Gestion de commandes
- Gestion des produits engendrés par ces commandes
- Gestion des articles entrant dans la fabrication de ces produits et de leurs nomenclatures- gammes
- Expédition des produits
- Facturation.
Ce type de progiciel est utilisé par des entreprises qui fabriquent, assemblent, ou modifient des produits ou des installations pour leur apporter de la valeur ajoutée. Il s’agit d’entreprises purement industrielles ou d’organisations fonctionnant en mode projet et en gestion à l’affaire.
GPAO et ERP
La GPAO se distingue de l’ERP par un élément essentiel : la comptabilité générale et analytique. L’ERP (Enterprise Resource Planning) est un outil qui intègre la totalité des fonctions de l’entreprise, qu’elles soient des fonctions financières (comptabilité générale, auxiliaire, analytique, budgétaire), des fonctions de gestion du personnel (paie, formation) et des fonctions logistiques (gestion des ventes, des achats, de la production, de la maintenance, de la logistique…).
En revanche, toutes les GPAO du marché peuvent intégrer des logiciels de comptabilité standard ou des logiciels de paie.
Objectifs de la GPAO
La GPAO permet de piloter l’apport de valeur ajoutée dans l’entreprise. Son objectif principal est de connaître, de façon précise, le coût de revient industriel, de connaître les niveaux de stocks (matière première, produits finis et encours) et d’approvisionner les lignes de production avec le bon composant, au bon moment.
Maîtriser les stocks
La GPAO permet de calculer les besoins de l’entreprise en temps réel et d’envisager précisément dans quelle mesure :
- Elle peut encore fabriquer des produits
- Elle devra s’approvisionner en matière première pour répondre aux commandes
Cette gestion des stocks repose sur la maîtrise des données de base de la gestion industrielle : les nomenclatures, les gammes et la description de la structure industrielle (sections, centre de charges, poste de charges, ressources, calendriers…).
Maîtriser les coûts de revient
Dans un contexte économique où les coûts des matières fluctuent, le coût de l’énergie augmente et les capacités d’investissement se raréfient, la marge brute des entreprises industrielles est faible (en règle générale). La maîtrise des coûts de revient est donc impérative. La comptabilité industrielle est un des pivots de la GPAO.
Maîtriser la production
Une GPAO est le support :
- Des processus de maîtrise de la demande (clients)
- Des processus de maîtrise des achats / approvisionnements
- Des processus de planification
- De calcul des besoins
- De lancement-ordonnancement
- De suivi de la production
- De traçabilité industrielle
- De déclaration de production
Ces processus livrent, à leur tour, les données qui sont ensuite utilisées pour le pilotage des temps de cycle (cadences standards, cadences réelles, analyses des dérives …).
REMARQUE
Des outils spécifiques permettent de suivre la production tout en minimisant les saisies et les surcoûts : le RFID1, les douchettes code à barres, les terminaux d’ateliers (écrans tactiles), etc.
Maîtriser la logistique et le service clients
La maîtrise de la production implique la maîtrise de la chaîne logistique. La GPAO permet d’acheter au bon moment, de produire juste à temps, ou encore, de livrer la quantité commandée dans la qualité requise et au moment prévu.
Les grands types de gestion de production
Il existe trois grands types de production selon le degré de standardisation et le volume de produits à fabriquer.
Production à l'affaire
La conception de machines spéciales, la livraison de produits uniques ou de prestations de services (maintenance des équipements industriels) requièrent des modes d'organisation spécifiques et donc des GPAO spécialisées plus proches de la gestion de projet que de la gestion industrielle.
Production à la commande et petite série
Un peu plus soutenus, les rythmes de production à la commande sont particuliers. Il s’agit, par exemple, de la fabrication de composants modulaires (fenêtres, portes, cuisines). Ce mode de production dans lequel le produit n’est déterminé qu'assez tardivement dans la chaîne de production, demande une GPAO capable de répondre de façon intelligente à la spécialisation retardée et à la configuration des produits à la commande. Le focus sera donc mis sur la capacité de maintenir, de façon adaptée, des données de base qui ne sont pas forcément statiques et répétitives.
Production de masse
Les entreprises industrielles produisent également des séries, plus ou moins importantes, de produits dont le procédé de fabrication est relativement répétitif. D'une manière générale, la taille des séries diminue. La capacité de réactivité, le changement de séries et la modularité de l’équipement industriel sont donc désormais un facteur clé de succès.
Intégrer une GPAO
Les systèmes existants
Les progiciels de GPAO se distinguent, les uns des autres, par le système qu’il propose. Il existe plusieurs modèles de gestion de la production selon le type de fabrication souhaitée.
- Les progiciels classiques de gestion de production (MRP, MRP II)
Ils ont l’avantage d’avoir évolué vers un outil de gestion globale de l’entreprise (gestion commerciale, plan directeur, gestion des matières et des charges de travail, calcul des coûts de revient, interfaçages avec les comptabilités...). Ils répondent aux principes de flux poussé et de production anticipée, nécessitant des prévisions. Ils calculent, en fonction des besoins et des délais d’obtention (temps de cycle ou délai d’approvisionnement), les ordres de fabrication et d’achat à lancer et les dates de lancement.
- Les progiciels de gestion d’atelier (MES) et/ou d’ordonnancement
Ils ne gèrent que les charges, le planning, les lancements, le suivi de fabrication. Ils permettent l’ordonnancement des opérations sur les machines, en optimisant les temps de cycles. Ils ne gèrent pas globalement l’entreprise et doivent donc être adjoints à une gestion commerciale ou une GPAO.
- Les progiciels de gestion JAT (Juste A Temps)
Ils sont souvent des modules de GPAO complètes qui gèrent les productions répétitives. Ils ne travaillent pas par ordre de fabrication, mais par programme de fabrication journalier. Les flux dans l’atelier sont souvent contrôlés par l’utilisation de Kanbans.
- Les progiciels de gestion à l’affaire
Ils sont adaptés à la gestion de fabrication d’un objet unique, comprenant un grand nombre de tâches. Le problème est le calcul du délai obtenu par le chemin critique, et l’attribution des ressources aux différentes tâches. Il ne faut pas confondre progiciel de gestion de projet et progiciel de gestion d’atelier. En effet, ces derniers incorporent l’environnement nécessaire (notion de gammes, îlots, cellules, machines...) et les algorithmes de placement (optimisation en fonction de critères tels que retard mini, charge maxi...), ce qui n’est pas le cas des progiciels de gestion de projet.
Le MRP privilégie la gestion des matières, la gestion d’atelier privilégie la gestion des charges. Les sous- fabricants de produits propres à nomenclatures complexes utilisent plutôt le MRP. Les constructions unitaires utiliseront la gestion de projet.
L'offre en logiciel
Le marché propose deux principales catégories de logiciels :
- Des grandes GPAO génériques le plus souvent transformées de façon plus ou moins heureuse en ERP.
- Des GPAO très verticales et spécialisées dans des secteurs d’activité précis. Elles sont portées par des éditeurs et éditeurs-intégrateurs de taille plus modeste.
Les facteurs clés de succès
L’intégration d’une GPAO impacte l’organisation et les façons de travailler de l’entreprise. Il est donc fortement conseillé de se faire accompagner par un consultant spécialisé dans le domaine.
L’expression des besoins
C’est à ce stade que se joue la simplification ou la complexité de la solution. Un bon consultant aidera l’entreprise à distinguer l’indispensable, l’utile et le superflu.
- La rédaction d’un cahier des charges «progiciel»
Il ne s’agit pas d’un cahier des charges au sens de l’informaticien, mais d’une synthèse de l’expression des besoins utilisateurs et des performances attendues (pas besoin de description de fichiers, de volume disque dur, de description des traitements...).
- L’existence d’un contrat
Il doit bien identifier les responsabilités, les limites de fourniture, les conditions de désengagement (en particulier la possibilité de récupérer les sources si le fournisseur est un petit développeur, la possibilité de récupérer les données en cas de changement de progiciel...).
- La mise en concurrence de fournisseurs
Cela permet d’éviter d’être séduit par le premier vendeur venu et de comparer solutions, prix et services.
- Les conditions de recette du progiciel
Elles doivent être prévues au contrat, par exemple avec un jeu d’essai préalablement mis au point, ou pour vérifier l’interfaçage avec la comptabilité ou d’autres logiciels utilisés par l’entreprise.
- Maintenance et formation
Il est important de prendre en compte dès le départ la maintenance du progiciel (et du matériel) ainsi que la formation des utilisateurs (éviter d’envoyer une seule personne qui apprendra aux autres, parce que c’est moins cher !). Un bon outil c’est surtout un outil bien utilisé.
- Exploitation et évolution
La pertinence d'une GPAO se mesure à la qualité des données de base de gestion de production : grammes/nomenclatures/ressources/postes de charges... La réussite du projet dépendra de la capacité de l'entreprise à gérer de façon rigoureuse l'ensemble des informations.
Source: Espace Numérique Entreprises (ENE)